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LES TROIS HERSEAUX : L’ANALYSE D’ECO-VIE

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Un important projet d'aménagement du territoire est d'actualité à Mouscron.

Un R.U.E. (Rapport Urbanistique et Environnemental) des ZACC (Zone d'Aménagement Communal Concerté) dites du « Blanc Ballot » et des « Trois Herseaux » a été établi par un bureau d'études agréé par la Région wallonne.

Ce document est soumis à enquête publique.

Il s’agit à la fois d’un « schéma urbanistique » (relatif à l’aménagement de trois quartiers) et d’une évaluation environnementale (d’une analyse des incidences probables du projet sur l'environnement). Tout ceci a fait couler beaucoup d'encre, que ce soit dans la presse ou dans la population (puisqu'une forte opposition s'est manifestée, qu'un comité d'opposants s'est constitué et qu'une pétition a récolté un très grand nombre de signatures).

En dehors du phénomène Nimby (« pas dans mon jardin »), Eco-Vie s'est bien évidemment penchée, en toute objectivité, sur l'un des plus gros dossiers que nous ayons eu à analyser jusqu'à présent puisqu'il est consacré à l’aménagement du territoire d’une zone de 137 ha située au cœur de la campagne herseautoise, et ce pour les 30 à 40 années à venir.

Pour que vous ayez une idée précise de l'ampleur de ce projet, il concerne 3,4 % de la superficie de l'entité mouscronnoise. Il n'est pas très courant d'avoir une ZACC de cette ampleur.

Il est donc clair que cela méritait que nous nous penchions sur cette étude (soit… 370 pages de rapport technique).

Nous présentons ci-dessous la teneur de l’analyse que nous avons adressée (sous forme de courrier) à la commune (toutes les remarques devront être analysées par l'auteur de l'étude, mais aussi par les autorités compétentes).

Tout d'abord, si nous considérons qu'en matière d'aménagement du territoire, il est important d'avoir une vision à long terme afin d'avoir un aménagement cohérent, nous nous demandons s'il est bien responsable de tabler sur une augmentation exponentielle de la population mouscronnoise dans les trente années à venir. En effet, l'accroissement de ladite population est essentiellement dû ces dernières années à la venue massive de Français qui viennent s'installer chez nous soit pour échapper à l'imposition des grandes fortunes en France, soit parce que les prix des terrains et habitations sont plus abordables chez nous. Nous pouvons dès lors nous demander si ce phénomène sera toujours d'actualité dans les prochaines années (une simple modification de législation pourrait changer la donne). Le même flux, lié au prix des terrains et des habitations, est observable pour les acheteurs flamands potentiels. Ce phénomène n'est d'ailleurs pas sans incidence sur le prix de l'immobilier mouscronnois.

Nos maisons de repos également ainsi que nos institutions pour personnes handicapées accueillent bon nombre de Français. Cette « pression française » engendre, d'après l'étude, la nécessité de répondre à la demande. Ce qui revient à dire qu’il est nécessaire d’investir en zone frontalière belge pour répondre à un manque d'investissement du côté français. Est-il cohérent de sacrifier des terres agricoles pour répondre à des manquements français ?

De plus, la situation mouscronnoise présente des particularités qui nous amènent à émettre de sérieuses réserves. La densité de population dans l'entité de Mouscron est en effet déjà très importante puisque l'étude nous dit qu'actuellement, avec 14 habitants par hectare, elle est de 6 fois supérieure à la moyenne wallonne et de 3 fois supérieure à la moyenne de la province du Hainaut . Nous pouvons dès lors raisonnablement nous demander s'il faut encore augmenter cette densité, même en tenant un compte raisonnable de l’augmentation démographique.

Nous soulignons encore que l’annonce de ce projet, et la communication qui a suivi, ont suscité de bien légitimes inquiétudes au sein de la population de Herseaux : en témoigne le succès remporté par une pétition de protestation.

Nous nous interrogeons en outre sur le fait que l'étude relève que l'offre en terrain à bâtir serait faible dans notre entité. L'offre en nouveaux logements (en appartements, notamment) est bien réelle, elle - il suffit d'ouvrir les journaux toutes-boîtes pour s'en apercevoir. De plus, les biens mis en vente ne manquent visiblement pas !

Nous soutenons qu’une étude approfondie du parc des logements disponibles, ainsi qu’une politique de rénovations et certains aménagements et d’investissements, sont indispensables.

En tant qu'association dont l’objet social est relatif à la protection de l’environnement, nous nous sommes penchés sur ce dossier afin de remettre un avis circonstancié.

Premièrement, nous rappelons que nous nous trouvons dans le cœur de la campagne herseautoise, y construire de nouveaux quartiers n'est donc pas anodin.

 

Deuxièmement, nous attirons l’attention sur le fait que, l’étude, dans la partie « occupation du sol », dit que la superficie occupée par l'activité économique représente 12 % du territoire de Mouscron. Ces chiffres datant de 2010, ils sont à présent largement dépassés. Au demeurant, l'auteur de l'étude parle lui-même ailleurs de 14 % (ce qui est le pourcentage le plus souvent cité dans toutes les études). Si l’on ajoute encore à ces 14 %, la nouvelle (future) zone d'activités économiques envisagée au Marhem et une autre zone citée dans l'étude (45 ha à la Barberie), on arrive à plus de 15 % et à autant de disparitions de terres agricoles ... Il serait donc grand temps qu'on arrête dans les études, de citer les « besoins » de l'intercommunale de gestion économique IEG pour se pencher un peu sur l'utilisation parcimonieuse du sol et obtenir une mixité du territoire acceptable pour tous.

 

Faut-il rappeler que l'agriculture a déjà plus que suffisamment perdu en superficie dans notre entité ? Peut-on raisonnablement parler d'essor démographique sans y associer la question de l’alimentation de la population ? Chaque jour, nous pouvons lire ou entendre qu'il nous faut repenser nos modes de consommation et privilégier les circuits courts... Qui mieux que nos agriculteurs locaux peuvent répondre à cette nécessité ? Notre terre, comme il est dit dans l'étude, est propice à l'agriculture. Alors pourquoi toujours la sacrifier ?

Bien sûr, il se fait que des fermiers encore aujourd'hui en activité ne trouvent pas de repreneurs : ne faudrait-il pas penser à favoriser la reprise des exploitations par de nouveaux agriculteurs (le cas échéant, en morcelant les grandes superficies) ? N'y a-t-il pas de jeunes agriculteurs qui auraient envie de reprendre une ferme ? N’y a-t-il pas un potentiel de fermiers « sans terres » ? La pression foncière est telle dans notre région qu'un jeune fermier n'a que peu de chances d'arriver au bout de sa carrière sans se voir exproprier... est-ce bien normal ???

Troisièmement, une autre affirmation de l'étude nous semble fallacieuse ; on y lit, en effet, que nous ne trouvons dans l'entité de Mouscron que peu de grandes enseignes dédiées aux achats alimentaires. Pourtant, l'entité de Mouscron compte plusieurs Colruyt, Lidl, Aldi, Delhaize, Carrefour, Match, Intermarché,... et des commerces comme des Spar. Et la même étude de se réjouir de la venue d'un Delhaize au centre commercial « Les Dauphins », récemment inauguré... Mais ce même Delhaize existait déjà à Mouscron, dans le quartier du Mont-à-Leux ! Il ne s'agit en réalité que du simple déménagement d'un commerce implanté auparavant dans le petit pôle commercial de l'avenue Mozart. Tout cela ne serait-il que le reflet du regret d'un hyper Cora rêvé par certains ?

Quatrièmement, nous estimons encore qu’il aurait été possible d'augmenter les possibilités d'habitat en centre-ville, si le pouvoir politique n'avait pas pris l'option de construire un nouveau centre administratif, alors que la population mouscronnoise ne se plaint absolument pas des différents sites administratifs et que, de plus, tous (sauf celui du Plavitout) sont accessibles par les transports en commun. On gaspille là une superficie au sol qui aurait pu être autrement utile.

Cinquièmement, le risque d'inondations est bien réel, et il serait indispensable, comme il est dit dans l'étude, de prévoir non seulement des bassins d'orage suffisants mais aussi des noues ainsi qu’un réaménagement des abords des ruisseaux pour pouvoir temporiser davantage leur débit actuel en cas de fortes pluies, en tenant compte bien entendu du risque de perte de biodiversité que cela peut engendrer.

Sixièmement, au niveau de la mobilité :

- nous remarquons que, nulle part dans l'étude, ne sont évoqués les risques de voir la gare d'Herseaux disparaître (cette gare constitue encore un arrêt mais pose des problèmes de vandalisme depuis la disparition du guichet). Ceci nous paraît en totale contradiction avec le fait que la commune de Mouscron se soit déjà pourtant battue ces dernières années pour que l'arrêt à la gare d'Herseaux ne soit pas simplement et purement supprimé !

- de nombreux sentiers sont cités dans l'étude, certains sont mentionnés comme n'existant plus dans les faits, mais n'ayant pas été supprimés. C'est peut-être le moment de les réhabiliter et non pas, comme le préconise l'étude à la page 323, de les supprimer.

- une nouvelle voirie devrait voir le jour et devrait transiter sur une partie du territoire français. La création de cette route et sa fonction devant être décidées d'un commun accord et en coordination avec les autorités françaises compétentes. Qu'arrivera-t-il en cas de non accord ?

Septièmement, au niveau de l'environnement :

- l'étude précise que, dans le périmètre concerné, il y a des habitats intéressants pour les petits mammifères et un grand nombre d'oiseaux.

Enfin, nous insistons pour que le projet n'évolue qu'en fonction des besoins réels de la population et pour que celle-ci soit associée à la réflexion. Un comité de suivi serait indispensable ainsi que des outils d'évaluation (tel que le tableau de bord préconisé dans l'étude). Une régie foncière serait probablement aussi la bienvenue (il a été question, il y a plusieurs années, d'en créer une à Mouscron mais elle n’a jamais vu le jour... Sera-ce différent cette fois ?).

Si nous pouvons accepter la plupart des recommandations de l'étude, nous rejetons formellement la recommandation 18.1 (suppression – modification des sentiers inscrits à l'Atlas et concernés par le projet – voir ci-dessus).

Nous ne pouvons pas non plus être d'accord avec la réflexion à très long terme relative à la question de l'usage de la zone d'agriculture urbaine au centre de la ZACC des 3 Herseaux. Cette zone, qui serait insérée au cœur d’un parc immobilier, doit rester agricole ; elle participera et enrichira ainsi la vie de toutes et tous !

 



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